JUSTICE. Le crash avait fait neuf morts en 2007. Cinq familles de victimes portent plainte contre l'armée de l'air
Crash du Sinaï : « Nous voulons la vérité »
La stèle à la mémoire des victimes du crash du Sinaï. (photo dr)
Pas de boîte noire. Quand le bimoteur de la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan s'est écrasé dans le Sinaï égyptien le 6 mai 2007, provoquant la mort de neuf militaires, il n'a pas été possible de déterminer avec certitude les causes de l'accident. Il volait très bas, ce qui correspondait à sa mission de surveillance du respect des accords de paix.
Un appel de détresse aurait alors été capté par un militaire de la base d'el-Gorah, en Égypte, indiquant une panne à bord de l'appareil et un nécessaire atterrissage d'urgence. Et ce, juste avant que le crash survienne. L'avion a percuté un camion avant de finir sa chute dans le flanc d'une montagne. Il n'y eut aucun survivant. Quant à l'appel radio, il n'aurait pas été enregistré.
« Lors des funérailles à Mont-de-Marsan, le 19 juin, alors que j'étais encore tout à ma souffrance, que je ne demandais rien et que je n'envisageais pas du tout une action en justice, un gradé est venu me voir pour me dire qu'il n'y avait jamais eu d'appel de détresse. Pourquoi m'a-t-il dit cela ? Le général Puget me l'a répété quelques jours plus tard à la base de Cognac », raconte Patrick Pike, père de l'une des neuf victimes du crash, qui réside à Annepont en Charente-Maritime.
Il ne comprend pas pourquoi, avant même que l'enquête sur les circonstances de l'accident ait débuté, la hiérarchie militaire pointait déjà l'erreur humaine plutôt que la défaillance technique.
3 000 heures de vol
L'enquête a duré un an. « Et l'on nous a avertis, après inspection des effets personnels des victimes, que l'accident était bien dû à un facteur humain. Et que c'était donc mon fils le responsable. »
Car Guillaume Pike, 33 ans, 3 000 heures de vol, copilote, était aux commandes de l'appareil, un Twin Otter, au moment du crash. Il se trouvait à gauche du commandant de bord Laurence Briançon-Forest (1).
« Il y a trop de zones d'ombre dans cette affaire. Nous voulons connaître la vérité. On ne peut absolument pas laisser sous-entendre qu'il y eu défaillance humaine, laisser accuser mon fils sans réagir », explique Patrick Pike qui a donc décidé de porter plainte contre l'armée de l'air.
Portée par Me Roland Rappaport, avocat parisien grand spécialiste des accidents d'avion, cette plainte individuelle a reçu le renfort de celles des familles de Julien Flego, Hervé Bouffenie, Yann Poilly et Laurent Pottier qui ont également perdu la vie dans le crash et étaient tous militaires à la base aérienne de Mont-de-Marsan.
Se trouvait également à bord de l'appareil le Pontois Dominique Durand, de la base aérienne de Cognac, qui était affecté au ravitaillement technique, un Parisien, Dominique Grau, et un jeune Canadien, Benoît Chevalier.
La conviction de Patrick Pike, c'est qu'il y a bien eu un mayday (2) comme cela avait été signalé dans les heures qui ont suivi l'accident.
Après avoir été classé par le procureur auprès du tribunal aux armées de Paris, le dossier est donc ouvert à nouveau à la suite des plaintes des cinq familles. Il est sur le bureau du juge d'instruction.
(1) Sur le Twin Otter, c'est toujours le copilote qui est aux commandes.
(2) Message de détresse.
Auteur : thomas brosset
t.brosset@sudouest.com